Lettre à mon fils

Mon cher Nino,

La nuit dernière a de nouveau été difficile… Tu n’as presque pas dormi, et au milieu de la nuit tu nous a dit, tu nous a crié même, toute ta frustration.

Nous avons été les témoins impuissants de cette rage qui t’a emporté comme dans un tourbillon, qui t’a fait perdre tout contrôle. Ta fureur a pris les commandes… out of control !

Angoissant… Votre « enfant » disparaît, et n’apparaît alors plus que la colère pure, la haine, la frustration… Quelque chose d’inconnu vous toise par les yeux de votre fils, quelque chose d’angoissant et de haineux…

J’ai essayé de trouver le contact avec toi, au delà de cette colère, de t’atteindre dans toute ta fureur, tout en restant moi-même calme… ce qui est bien difficile, tant, parfois, nous ne sommes plus que fatigue et frustration…

Peut-être t’avons-nous parfois blessé avec des mots que nous ne pensions pas… Des mots nés de notre frustration totale… Nous ne sommes aussi que des êtres humains…

Bien sûr, tu es furieux et frustré… Les autres enfants de ton âge découvrent la vie, l’amour, vivent de grandes et de petites aventures, deviennent indépendants…

Et toi, tu es si souvent freiné par l’autisme, par tes peurs, peut-être aussi par nous, par la société…

Tu vois tout ce que les autres peuvent faire sans se poser de question, alors que pour toi tu remarques que tout est pénible et compliqué.

Cela rend furieux et frustré.

Je te comprends !

Malgré ta colère, je te regarde et je te chéris. Tu as tant de talents, ton cœur est si grand.

Il faut juste que tu apprennes encore à canaliser ta fureur, à la maîtriser.

Tu peux le faire, tu as déjà accompli tant de choses que nous pensions impossibles il y a encore quelques années…

Nous serons là, même si en ce moment tu nous rejettes, les parents sont là pour ça aussi.

Hier, tu m’as demandé si j’étais aussi autiste. J’ai répondu non, mais j’ai recensé toutes les personnes que je connais qui souffrent d’autisme. Afin que tu ne te sentes pas si seul.

Tu répètes toujours que c’est difficile, que c’est à cause de l’autisme.

C’est dur en ce moment, mon Nino, mais des jours meilleurs viendront, j’en suis sûre. J’apprécie chaque instant tranquille avec toi, chaque « moment sans tempête », je suis émue lorsque tu dis « je t’aime », ou que tu dis à ton frère « tu es mon pote ».

J’aime lorsque tu ris ou que tu vibres en regardant un match de football, et que tu peux te réjouir du fond du cœur lorsque « ton équipe » marque un but…

Et c’est cela, les moments qui comptent, non ???

Je t’aime,

Maman

J’ai publié ce texte, parce que ça m’a fait du bien de l’écrire, et parce qu’il y a peut-être quelque part d’autres parents pris dans la tempête de l’autisme qui pourront trouver quelque consolation à savoir qu’ils ne sont pas seuls dans cette tempête…

Si d’autres parents se trouvent dans la tempête de l’autisme et de la puberté, j’aurai plaisir à échanger avec eux. 

Meilleures salutations,

Steffi